05 Livres




Jean-Claude BAUDOT – Photos : Sylvie RUAU

Editions GLENAT

1992




Personnage unique, star mondiale, mythe millénaire, notre bon vieux Père Noël est insaisissable.

Qui est-il ? Que fait-il ? Comment vit-il ?

Le Père Noël a été représenté dans toutes les positions, dans tous les pays et dans toutes les matières. A pied, à âne, en traîneau, à ski, en voiture, en avion, assis, debout, couché, gai, triste, indifférent, en colère, en forme de bouteilles, de tirelires, d’ampoules électriques, de boîtes, de pipes, d’assiettes…en bois, en verre, en fer, en bronze, en celluloïd, en papier maché, en caoutchouc, en tissu…

Bref, le Père Noël est un monde à lui tout seul.

Il s’explique lui-même, avec la complicité de Jean-Claude Baudot et de la photographe Sylvie Ruau, contant mois par mois ses nombreuses activités et ses désirs communicatifs.




Un extrait du livre "Le système des objets" de Jean Baudrillard (1929-2007). Publié en 1968 chez Gallimard.



Ceux qui récusent le pouvoir de conditionnement de la publicité (des mass media en général) n’ont pas saisi la logique particulière de leur efficacité. Qui n’est plus une logique de l’énoncé et de la preuve, mais une logique de la fable et de l’adhésion. On n’y croit pas, et pourtant on y tient. La
« démonstration » du produit ne persuade au fond personne : elle sert à rationaliser l’achat, qui de toutes façons précède ou déborde les motifs rationnels. Pourtant, sans « croire » à ce produit, je crois à la publicité qui veut m’y faire croire. C’est toute l’histoire du Père Noël : les enfants non plus ne s’interrogent guère sur son existence et ne procèdent jamais de cette existence aux cadeaux qu’ils reçoivent comme de la cause à l’effet — la croyance au Père Noël est une fabulation rationalisante qui permet de préserver dans la seconde enfance la relation miraculeuse de la gratification par les parents (et plus précisément par la mère) qui fut celle de la prime enfance. Cette relation miraculeuse, révolue dans les faits, s’intériorise dans une croyance qui en est le prolongement idéal. Ce romanesque n’est pas artificiel : il est fondé sur l’intérêt réciproque qu’ont les deux parties à préserver cette relation. Le Père Noël dans tout cela est sans importance, et l’enfant n’y croit que parce qu’il est au fond sans importance. Ce qu’il consomme à travers cette image, cette fiction, cet alibi — et à quoi il croira lors même qu’il n’y croira plus, — c’est le jeu de la sollicitude parentale miraculeuse et le soin que prennent les parents d’être complices de sa fable. Les cadeaux ne font que sanctionner ce compromis.
L’opération publicitaire est du même ordre. Ni le discours rhétorique, ni même le discours informatif sur les vertus du produit n’ont d’effet décisif sur l’acheteur. Ce à quoi l’individu est sensible, c’est à la thématique latente de protection et de gratification, c’est au soin qu’ « on » prend de le solliciter et de le persuader, c’est au signe, illisible à la conscience, qu’il a quelque part une instance (ici sociale, mais qui renvoie directement à l’image de la mère) qui accepte de l’informer sur ses propres désirs, de les prévenir et de les rationaliser à ses propres yeux. Il ne « croit » donc pas davantage à la publicité que l’enfant au Père Noël. Ce qui ne l’empêche pas d’adhérer tout autant à une situation infantile intériorisée, et de se comporter en conséquence. D’où l’efficacité très réelle de la publicité, selon une logique qui, pour n’être pas celle du conditionnement-réflexe, n’en n’en est pas pas moins très rigoureuse : logique de la croyance et de la régression.






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